Les enfants sont des énigmes lumineuses
– Daniel Pennac
A Jeanne,
Mon bébé, mon amour, ma petite chérie… je ne comprends pas ce qui nous est arrivé… comment est ce possible que tu me détestes autant … mon coeur de papa est brisé, je suis triste ma chérie…
J’ai tellement pleuré… oui ma chérie j’ai pleuré ! Même ceux que l’on croit être les plus forts pleurent… ce n’est pas de la faiblesse… simplement un sentiment qui t’envahit, qui te prend au plus profond de toi…qui te rappelle à ta condition de simple mortel… l’exacerbation d’une tristesse profonde, infinie… irréversible.
Pas un jour ne passe sans que je ne regarde des photos et des videos de toi… petite… me remémorant ces moments ou nous vivions insouciants, tous sous le même toit… un amour inconditionnel.
Bientôt 6 mois que l’on ne s’est pas vu, pas parlé… déjà 6 longs mois que je n’ai pas pu sentir ton odeur, te prendre dans mes bras… te couvrir de baisers… t’avoir là prés de moi…
Et je t’avoue mon p’tit coeur que je suis dans l’incompréhension totale ! Je pensais que nous avions dépassé tout celà… qu’après les bons moments que nous avions passé ensemble tout était revenu « comme avant »… mais non… ce n’est pas le cas.
Triste constat, qu’ai je fait pour çà ?… sur les 3 dernières années j’ai été privé de toi pendant 18 longs mois…. D’abord 12 puis maintenant 6… Mon coeur de papa est meurtri… j’ai tellement pleuré qu’aujourd’hui je n’y arrive plus !
Autour de moi j’entend toujours le même refrain, le temps rattrape tout ! Mais je sais bien que ce n’est pas vrai… tes blessures, les miennes sont là à jamais… elles vont façonner ce que nous deviendrons… Jamais je ne pourrai revivre ces moments perdus… te voir évoluer, devenir une petite fille, vivre et partager ton quotidien, jamais les câlins perdus ne pourront être vécus…
Tout çà n’est qu’un gâchis ! Je pense vivre la plus dure des sanctions… ne pas te voir… tu ne peux pas me rayer de ta vie comme çà, sur un coup de tête… je suis ton papa, tu es la chair de ma chair, ce que j’ai de plus preiceux au monde…
Tu es et resteras à jamais mon bébé… mon premier enfant, toi qui a changé ma vie, m’a projeté dans la vie d’adulte, responsable… nous étions heureux… et j’ai tout cassé !
Le plus triste ma chérie, c’est que je sais que tout est de ma faute. J’aurai du te protéger de nos querelles d’adulte, être fort, garder la tête haute…. Mais j’ai craqué… j’ai perdu pied…
Mon corps était là mais ma tête a bien faillit imploser, à tel point que j’ai perdu tout discernement… une petite fille ne devrait pas voir son papa sombrer dans la maladie ainsi, je te l’accorde. Une petite fille innocente n’aurait pas du voir son papa mettre un genou a terre.
Je sais que tu as eu peur pour moi, je sais que tu as peur de moi …. J’ai honte de l’image que je t’ai montré, pleurant, errant comme une âme en peine, à la limite de la folie… je sais que tu as été triste de me voir comme çà, triste de me voir vivre comme un clochard…. Sans eau, sans lit, sans rien…. Toi qui me mettait sur piédestal… ma chute a été aussi très difficile pour toi… je le sais…
Je sais aussi que pour te protéger tu m’as imaginé et à souhaiter ma mort… et petit a petit tu t’es détaché de moi… te construisant sans moi.
J’ai failli à ma tâche de papa… j’aurai du être fort et jouer mon rôle sans vaciller, te protéger, te défendre…. Au lieu de ça j’ai continué a m’apitoyer sur mon sort… me plaçant en victime !
J’ai mis du temps à ouvrir les yeux, à reprendre le chemin de la sagesse, comprendre que j’ étais malade, comprendre qu’il n’y a avait pas de victime… juste trop d’ego, trop de matériel, trop de tout…
Mais il faut que tu saches ma chérie, que je ne regrette rien de ma vie d’avant…. J’ai essayé de vous donner le meilleur me sacrifiant totalement. Moi le zébre, soit disant si intelligent je me suis laissé prendre au piège de la vie… comme cette grosse vague qui bientôt s’effondre sur toi et te garde captif, là, sous l’eau… sans aucun moyen d’en ressortir…
Mon seul regret est de t’avoir blessé, de t’avoir volé ta jeunesse et ton insouciance en quelque sorte… mais ma chérie il faut que tu saches que tout celà m’a été bénéfique…. Même si tout ne s’est pas passé comme ni toi ni moi nous le souhaitions, le résultat est là !
Je suis toujours vivant et j’ai retrouvé une joie de vivre que j’avais perdu depuis si longtemps.
J’ai vécu une mort…. L’ancien moi est parti…. Ou plutôt je suis redevenu celui que j’ai toujours été… le masque est tombé… à jamais… avec tout cà la tristesse et la noirceur sont elles aussi effacées…. J’aimerai tant que tu rencontres qui je suis… qui j’ai toujours été… qui je suis enfin redevenu…ton rire et tes sourires me manquent…
Les épreuves de la vie ne te changent pas, elles te ramènent simplement à qui tu étais avant…. Pas avant l’accident… mais avant que ce masque, que cette vie inauthentique viennent te capturer.
Encore une fois, je ne jette la pierre à personne ni à ta maman – surtout pas à toi – ni a ton frère et à ta soeur, ni a mes associés, ni à mes salariés, ni aux pires enculés qui ont essayé de me détruire pendant 15 années, ni aux jaloux, ni aux envieux…. J’ étais maitre de mon destin, j’ai pris les mauvais chemins, fais les mauvais choix… m’enfermant dans ma tombe petit à petit encore plus chaque jour.
Je n’implore pas ton pardon ma chérie, je souhaite juste que nous puissions renouer le dialogue, je souhaite te dire a quel point je t’aime, a quel point je suis fier de la petite fille que tu deviens… je veux juste être ton papa !
Je ne suis pas parfait, loin de là, mais je suis comme ça… je reste ton papa qui t’aime, qui souhaite ton bonheur… celui qui s’inquiète quand tu tousses, quand tu tombes, quand tu pleures… celui qui t’aime de manière inconditionnelle, celui que tu peux appeler a toute heure de la journée ou de la nuit si tu as un problème… bref juste ton papa…
Bonjour,
Je me joins à votre peine … étant divorcé je vois ma fille tout les quinze jours. C’est peu et par dessus tout je suis artisan donc il m’arrive de travailler par obligation même en ayant ma fille. Elle a 4 ans et m’a fait la remarque. Ça pique et c’est dur de l’entendre de sa bouche. Surtout qu’il me reste qu’elle car j’ai perdu mon fils, ce qui malheureusement a conduit à notre divorce.
Heureusement j’ai pris la décision de ne plus travailler quand j’ai ma fille et c’est tellement jouissant. Ne lâchez pas s’il vous plaît, vous ne l’avez pas perdu, c’est plus une distance qui semble énorme mais c’est à vous de trouver le courage de parcourir cette distance, par forcément tout de suite. Si je peux me permettre prenez votre temps et quand vous serais prêt allez sans prévenir. Et lisez lui votre lettre en ouvrant votre cœur comme vous l’avez fait la. J’espère vous avoir donné un peu d’espoir.
Un papa qui a eu la même douleur et qui comme je l’espère pour vous, à lui aussi reçu un petit coup de main.
Merci d’avoir pris le temps de partager votre histoire. Rien n’est gravé dans le marbre, tout peut bouger, tout doit evoluer. Chaque est un pas de plus vers autre chose…